Le stockage en profondeur
Le principe
Comment fonctionne le stockage en profondeur ?
Dans un stockage en profondeur ou stockage géologique, les déchets radioactifs sont placés, sans intention de récupération, dans une installation souterraine entourés d’une série de barrières ouvragées (barrières physiques qui empêchent ou réduisent le mouvement des radionucléides). L’objectif est donc que le stockage soit la destination finale de ces déchets radioactifs. Cette installation est construite dans une couche géologique stable (ou roche hôte, qui constitue la barrière naturelle), à une profondeur de plusieurs centaines de mètres. Après sa fermeture complète, l’installation formera un système passif qui ne nécessitera aucune autre intervention humaine. Les générations futures auront néanmoins la liberté de surveiller l’installation.
Comment la sûreté de l’Homme et la protection de l’environnement sont-elles garanties ?
Trois fonctions de sûreté (isolation, confinement ouvragé et retard) garantissent que l’Homme et l'environnement sont protégés des substances radioactives. La couche géologique qui entoure l’installation restera stable pendant des centaines de milliers d'années et isolera les déchets des changements qui surviendront en surface. Les différentes barrières ouvragées qui entourent les déchets resteront intactes pendant une très longue période, confinant les substances radioactives afin de prévenir toute dispersion pendant les premiers milliers d'années.
Si, à l’issue de cette période, des substances radioactives franchissent tout de même les barrières ouvragées, leur dispersion sera retardée par les propriétés de la roche hôte, qui agira comme une barrière naturelle. Au cours de cette lente migration des substances radioactives à travers la roche, la plupart d’entre elles perdront une bonne partie de leur radioactivité par désintégration. La faible quantité qui finira par se retrouver dans la biosphère après des dizaines ou centaines de milliers d'années ne sera plus nocive ni pour l’Homme ni pour l’environnement.
L’emballage
Comment les déchets radioactifs sont-ils emballés ?
Outre la couche géologique, l’installation de stockage joue elle aussi un rôle important en matière de sûreté. Tant l'emballage entourant les déchets radioactifs que l'installation elle-même confinent les substances radioactives pendant une longue période. L'emballage garantit également que les déchets pourront être mis en stockage en toute sûreté dans l’installation, en toutes circonstances. En fonction du type de déchets, l'ONDRAF prévoit deux types d'emballages différents pour le stockage : des monolithes et des superconteneurs.
Les fûts de déchets de faible ou moyenne activité et de longue durée de vie seront placés dans des coffres en béton ou « caissons » et seront encapsulés avec du mortier. Une fois le mortier durci, l’ensemble constituera un « monolithe ». Grâce à leurs propriétés chimiques et physiques, le béton et le mortier immobilisent les substances radioactives et limitent l'infiltration d'eau.
Les fûts de déchets de haute activité et de courte ou longue durée de vie seront entourés d'une couche d'acier au carbone et d'un épais cylindre en béton, lui-même enveloppé d'acier inoxydable. Cet ensemble s’appelle un superconteneur. L'acier et le cylindre en béton protègent du rayonnement. En outre, le béton protège l'acier de la corrosion. Le superconteneur empêche donc l'eau de s'infiltrer et d'entrer en contact avec les déchets radioactifs.
Que devient l’installation de stockage après son remplissage ?
Les monolithes et les superconteneurs seront stockés dans des galeries souterraines séparées. Une fois tous les déchets radioactifs placés dans une galerie, celle-ci sera remblayée par du mortier et d'autres matériaux spécifiques, tout comme les galeries principales et les puits d'accès. De cette façon, les galeries de stockage et donc l’installation elle-même formeront une barrière ouvragée qui contribuera à confiner les déchets.
Le sous-sol
Dans quelles roches hôtes le stockage en profondeur est-il possible ?
Dans le monde, il existe trois catégories de roches hôtes possibles pour le stockage géologique : (1) les roches cristallines telles que le granite, (2) les évaporites telles que le sel et (3) les roches argileuses. En Belgique, ce sont les roches argileuses qui semblent être les plus indiquées pour abriter un stockage en profondeur de déchets radioactifs. Le sous-sol belge contient notamment des roches argileuses faiblement indurées : l'argile de Boom et l'argile yprésienne. Ces deux formations argileuses ont des propriétés similaires qui conviennent au stockage en profondeur. Elles se sont formées il y a plusieurs dizaines de millions d'années et sont très stables. Dans le sud du pays, on trouve également de l'argile indurée (e.g. schistes) qui pourrait sans doute convenir à un stockage en profondeur.
Les recherches menées par l'ONDRAF depuis plus de 40 ans se concentrent principalement sur les argiles faiblement indurées, situées dans le nord-est du pays. Le centre de recherche nucléaire SCK CEN, situé dans cette région, a en effet décidé, dans les années 1970, de construire le laboratoire souterrain HADES dans l'argile de Boom, sur leur site à Mol.
Pourquoi l’argile faiblement indurée de notre pays se prête-t-elle au stockage en profondeur ?
L'argile faiblement indurée possède trois propriétés majeures qui font qu’elle se prête bien au stockage en profondeur. Tout d’abord, cette argile est plastique, ce qui signifie que les fissures qui s’y forment pendant l'excavation des galeries se referment d'elles-mêmes après la pose d’une paroi en béton. De plus, cette argile ne laisse presque pas passer l’eau. Enfin, les minéraux argileux ont la propriété de fixer une grande partie des substances radioactives de sorte que, lorsque celles-ci s’échapperont finalement de leur confinement ouvragé, elles seront piégées dans l’argile.
Existe-t-il des exemples d’emballage argileux naturel ?
La nature regorge d’exemples d’objets restés intacts pendant des centaines de milliers d’années dans une couche d’argile. Au siècle dernier, par exemple, des troncs d’arbres primitifs datant de l’époque des mammouths ont été découverts dans une carrière d’argile italienne. Cet « emballage argileux » naturel s’est avéré si efficace que le bois était encore combustible. Au Canada, des géologues ont découvert un important dépôt d'uranium vieux d'un milliard d'années à environ 430 mètres de profondeur dans une couche d'argile située sous un lac. Le dépôt d'uranium est resté pratiquement intact pendant tout ce temps grâce à la couche d'argile qui forme une barrière naturelle autour du minerai. À la surface du lac, aucun signe ne révèle la présence de ce dépôt d'uranium et l’eau est d’ailleurs conforme aux normes imposées à l'eau potable.
Les changements climatiques
Quel est l’impact de changements climatiques sur une installation de stockage en profondeur ?
Aujourd'hui, il est surtout question de réchauffement climatique qui pourrait entraîner une élévation du niveau de la mer. Une partie de la Belgique pourrait alors se trouver sous l’eau. Dans un tel scénario, la vulnérabilité de l’entreposage des déchets dans des bâtiments en surface est évidente. En revanche, si ces déchets sont stockés en profondeur, ils restent isolés et confinés, à l’abri de ces changements.
Les chercheurs s'intéressent également aux changements climatiques à plus long terme, sur des centaines de milliers d’années, et en particulier, à l'influence des périodes glaciaires. Les ères glaciaires et les intervalles plus chauds comme celui que nous vivons actuellement alternent tous les cent mille ans environ. Dans nos régions, une ère glaciaire induit surtout des températures plus froides et l'apparition de permafrosts. De tels phénomènes cycliques modifient considérablement le paysage (e.g. érosion, incision des rivières). C'est pour cette raison qu'une installation de stockage sera construite à plusieurs centaines de mètres de profondeur, afin que ces perturbations n'en affectent pas la sûreté.
Les tremblements de terre pourraient-ils avoir un impact sur l’installation de stockage ?
Lors des tremblements de terre, les dommages les plus importants se produisent à la surface de la terre. De plus, les séismes qui se produisent en Belgique sont généralement de faible intensité. Ils apparaissent souvent dans des zones connues. Toute installation de stockage souterraine sera donc construite à distance des zones séismiques connues afin de réduire au minimum l'impact potentiel d'un séisme.
La récupérabilité
Les déchets de l’installation de stockage peuvent-ils être récupérés ?
La construction de l’installation et la mise en stockage des déchets prendront des décennies. Bien que cela ne soit pas l’objectif poursuivi, la possibilité de pouvoir récupérer les déchets pendant une certaine période est prévue. La durée de cette période sera déterminée en concertation avec la société et sera de toute façon limitée dans le temps. Après cela, l’installation de stockage sera complètement fermée pour garantir la sûreté des générations futures, sans qu’aucune autre action ne soit requise de leur part. C’est ce que nous appelons la sûreté passive.
Il deviendra de plus en plus difficile de récupérer les déchets à mesure que l’installation de stockage prendra sa forme définitive. Par exemple, il sera plus facile de récupérer les déchets avant que les galeries de stockage ne soient remblayées. En théorie, il sera toujours possible de récupérer les déchets après la fermeture complète de l’installation, mais cela nécessitera de recourir à des moyens plus importants.
Le concept
À quoi ressemble une installation de stockage en profondeur ?
Elle se compose d’un réseau de galeries souterraines horizontales dans lesquelles sont placés les déchets radioactifs. Ces galeries sont reliées entre elles par des galeries principales accessibles depuis la surface de la terre au moyen de puits verticaux. Une fois les galeries de stockage remplies de déchets radioactifs, elles seront remblayées par du mortier et entièrement fermées. Ensuite, les galeries principales seront également remblayées et scellées, tout comme les puits d'accès.
Le concept de l’installation de stockage prévoit la construction de deux zones distinctes. Celles-ci seront construites, remplies de déchets, remblayées et scellées successivement. L’une de ces zones accueillera les déchets de faible ou moyenne activité et de longue durée de vie, et l’autre, les déchets de haute activité. Vu que les déchets de haute activité dégagent de la chaleur, les galeries de stockage qui les abriteront seront plus éloignées les unes des autres. Selon le concept, ces deux zones forment, ensemble, une seule installation de stockage, bien qu'il soit également possible de construire deux installations différentes.
Des mesures de contrôle seront effectuées tout au long des opérations de remplissage de l’installation de stockage. Même après la fermeture complète de l’installation de stockage, des mesures de contrôle environnemental seront encore effectuées. Il appartiendra aux générations futures de décider de la durée de ces mesures. Toutefois, celles-ci ne sont pas nécessaires pour assurer la sûreté de l’installation. En effet, l’installation de stockage en profondeur est conçue comme un système passif.