La recherche 

La recherche se fonde sur un programme complet de Research, Development and Demonstration (RD&D) et se concentre sur l'argile faiblement indurée comme roche hôte potentielle pour une installation de stockage en profondeur. L’ONDRAF effectue certaines de ces recherches et en confie d’autres à des partenaires scientifiques belges et étrangers (universités, centres de recherche, bureaux d’études, partenaires industriels, etc.). C’est l’ONDRAF qui détermine les besoins et la portée de toutes les études, en discute les résultats et qui veille à intégrer toutes les dimensions du programme afin de pouvoir construire un stockage sûr. Depuis le début des années 1980, notre programme de recherche utilise le laboratoire souterrain HADES à Mol, dont la construction a été initiée par le SCK CEN.  

La recherche sur la gestion des déchets radioactifs suit une approche transparente et scientifique au niveau international. Les connaissances et l'expérience sont partagées, les ressources sont mises en commun et les résultats sont publiés dans la littérature scientifique et soumis à un examen par les pairs. Ainsi, le programme de RD&D de l'ONDRAF se base sur des connaissances qui vont bien au-delà de celles acquises dans le cadre de la recherche belge. Nous travaillons donc en étroite collaboration avec nos organisations sœurs et diverses organisations internationales. 

Les recherches menées dans le sous-sol offrent la possibilité d'étudier les fonctions de sûreté d'un système de stockage en conditions réelles et de prouver sa faisabilité technique. Il est ainsi possible de compléter, avec des expériences in situ, l'expertise qui sera nécessaire pour construire une installation de stockage en profondeur répondant à toutes les exigences de sûreté. 

Depuis plus de 40 ans, des scientifiques mènent des recherches dans HADES à Mol, le plus ancien laboratoire d'Europe construit dans l’argile. Deux puits d’accès permettent de descendre dans le laboratoire, qui se situe à une profondeur de 225 mètres. La galerie qui relie ces deux puits s’étend sur environ 150 mètres. L'ONDRAF gère et exploite HADES en collaboration avec le centre de recherche SCK CEN. Depuis 1995, ces activités sont menées sous la bannière du groupement d’intérêt économique EURIDICE. Le laboratoire fait autorité sur la scène internationale, au même titre que les recherches qui y sont réalisées. HADES n’abritera toutefois jamais de déchets radioactifs. 

Grâce à ce laboratoire, l’ONDRAF a acquis une grande expertise des techniques d'excavation et de construction dans l'argile faiblement indurée. Nous avons également réalisé des études sur le comportement de l’argile autour des galeries, perturbée par les excavations. Les résultats confirment le caractère plastique de l’argile car  les fissures se referment d'elles-mêmes. La conclusion est donc claire : la construction industrielle d'une installation de stockage en profondeur dans de l'argile faiblement indurée est techniquement possible avec les technologies dont nous disposons aujourd’hui. 

HADES est une installation de recherche nucléaire autorisée de classe II, ce qui nous permet d'utiliser une variété de sources radioactives et de traceurs. Nous pouvons ainsi réaliser des expériences avec des substances radioactives dans des conditions réelles. Nous complétons nos recherches par des expériences dans des laboratoires en surface et des simulations numériques afin de prédire les résultats à long terme. En outre, des tests de démonstration à grande échelle permettent de confirmer les résultats des expériences à petite échelle et d’affiner les modèles prédictifs.  

Le laboratoire souterrain abrite des centaines d'instruments de mesure. Ils sont utilisés lors d'expériences ou de travaux de construction pour mesurer, par exemple, la pression de l'eau, la température et les déformations à différents endroits. Une fois installés dans l'argile, les instruments de mesure sont souvent inaccessibles. En outre, ils doivent être étanches et capables de résister à de grandes pressions. De nombreux capteurs ont donc été spécialement adaptés et réalisés sur mesure. 

L’expérience de chauffe à grande échelle PRACLAY a débuté en 2014 et mime la chaleur dégagée par les déchets de haute activité. Cette expérience consiste à chauffer pendant dix ans une galerie de 30 mètres de long à une température constante de 80°C à l'endroit où la paroi de la galerie est en contact avec l'argile. Les chercheurs étudient ainsi l'impact de cette chaleur sur l'argile. Ils mesurent notamment la pression et la température dans l'argile, ainsi que l'évolution chimique de l'eau interstitielle. Tous les résultats déjà obtenus confirment les connaissances acquises sur le comportement de l'argile lorsqu'elle est chauffée. Ils démontrent surtout que les propriétés qui rendent l'argile faiblement indurée si apte à servir de roche hôte ne changent pas de manière significative après une exposition prolongée à la chaleur. 

Une partie importante de la recherche a lieu dans des laboratoires en surface. Des scientifiques y étudient le comportement mécanique de l'argile dans des installations d'essai spécialement conçues à cet effet ou mesurent la vitesse de migration des substances radioactives dans l'argile dans un environnement plus contrôlé. Pour ces tests en surface, on utilise des échantillons d’argile de Boom ayant subi le moins de perturbations possible. Ils sont prélevés par le biais de forages carottés. 

Il est essentiel de démontrer la sûreté d’une installation de stockage en profondeur, même à très long terme. Pour ce faire, les scientifiques s'appuient notamment sur des modèles numériques qui représentent toutes les parties du système de stockage et simulent des expériences particulièrement longues. Les résultats des simulations numériques sont alors comparés à ceux d'expériences réelles. Sur cette base, les chercheurs peuvent affiner tant les simulations que les expériences. Les modèles numériques permettent ainsi d’étudier le comportement à long terme de l’installation de stockage et d’en renforcer la sûreté. 

D'une part, le programme de RD&D permet de confirmer, d'affiner et d'intégrer  les connaissances et l'expérience acquises et ce, afin de réduire les incertitudes restantes et d'augmenter les marges de sûreté. D'autre part, le programme de RD&D doit être flexible et s'adapter à l'évolution du contexte technique, scientifique et sociétal. En effet, le développement d'une installation de stockage en profondeur et sa réalisation progressive prendront plusieurs décennies.  

L'ONDRAF et le SCK CEN se sont engagés à poursuivre leur collaboration au sein d’HADES jusqu'à 2045 au moins,  tant pour compléter les expériences existantes que pour en concevoir de nouvelles. Une fois qu'un emplacement aura été choisi pour l’installation de stockage, un programme spécifique de RD&D devra également être lancé.  

HADES n'est pas un laboratoire de recherche isolé. Ainsi, la Commission européenne, avec ses programmes et budgets de recherche, a joué un rôle crucial dans la mise en place du laboratoire lui-même et dans de nombreuses expériences. Nous coopérons également avec de nombreuses organisations internationales et avec nos organisations sœurs dans divers pays. Ces collaborations ne seraient pas possibles sans une totale transparence sur les résultats des expériences. Ainsi, nos recherches sont publiées dans des revues scientifiques et présentées à diverses conférences dans le monde entier.  

Un exemple d'initiative internationale à laquelle l'ONDRAF participe est la plateforme de concertation IGD-TP soutenue par la Commission européenne. Elle comprend des organisations de gestion de déchets issues de douze pays différents. La plateforme se concentre sur le stockage en profondeur et lance ses propres projets de recherche. Nous participons également au programme de recherche européen EURAD. Sans oublier les conférences, colloques et réunions internationales sur l'argile (Clay Conference par exemple) et sur le stockage en profondeur de l'Agence pour l'Énergie Nucléaire (AEN) (ICGR et IGSC entre autres), ou encore de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA). Par ailleurs, l'ONDRAF fait partie de l'association internationale EDRAM et de la plateforme de concertation IDKM. Cette dernière se concentre sur la manière de préserver et de transmettre à très long terme les connaissances relatives aux installations de stockage. 

La gestion à long terme des déchets de haute activité et/ou de longue durée de vie est non seulement une question technico-scientifique, mais aussi une question de société. Elle génère des défis éthiques importants. La décision que nous prendrons concernant le stockage des déchets aura encore un impact pendant des centaines de milliers d'années. De plus, des incertitudes subsisteront toujours au moment où cette décision devra être prise.  

Protéger les générations futures et ne pas leur transmettre de charges indues constituent deux préoccupations majeures de la gestion à long terme des déchets radioactifs. C’est une question d’équité intergénérationnelle. Lorsqu’il s’agit d’équité, il s’agit d’équilibre et celui-ci doit être trouvé non seulement entre les générations mais aussi au sein de chacune d’elles, en tentant de concilier les intérêts de toutes les parties prenantes (équité intragénérationnelle). Laisser des possibilités de choix aux générations futures sans compromettre leur sûreté ni celle de nos contemporains est le défi que l’ONDRAF doit relever. 

L'ONDRAF mène depuis des années des études éthiques avec l'Université Libre de Bruxelles (ULB) pour mieux comprendre ce que l'on entend par « protection des générations futures » et quels droits et responsabilités ce principe recouvre. Ces études visent à fournir les réflexions qui permettront à la société de procéder à des choix éclairés en tenant compte de l’ensemble des enjeux présents et à venir. Bon nombre des études entreprises avec l’université ont déjà été publiées et soumises à la critique des pairs.  

L’apport de l’ONDRAF est essentiel car il permet de mener ces études sur des sujets techniques précis, en suivant une approche à la fois pragmatique et pluraliste. Ces travaux viennent alimenter l’abondante littérature relative à la gestion des déchets radioactifs, aux modalités de mise en œuvre des solutions d’enfouissement, à la comparaison des options et au traitement de l’incertitude, que celle-ci soit technique ou en lien avec l’évolution de nos sociétés humaines.